mercredi 24 janvier 2018

BM 18 - DRAGONFLY EYES par Louise Cardinaux


Dragonfly Eyes: jusqu'où sera-t-on capables d'aller?


Dragonfly eyes est une fiction originale, constituée entièrement d'images de caméra de surveillance chinoises. Fiction qui dénonce les dérives de notre société actuelle, ainsi que les désastres de la vie de manière générale. On y retrouve deux personnages principaux, qui ne garderont tout au long du film ni nom ni corps fixes, bien que l'on peut se rattacher principalement à deux nom: Xing Ting, une moinesse se frayant un chemin dans la réalité citadine, et Ke Fan, son futur petit ami, amoureux au point de commettre des délits en tout genre. La voix off est là pour nous rappeler l'identité de chaque objet que repère le programme qui analyse les images. Ainsi le robot nous guide-t-il du début jusqu'à la fin: "man", "woman", "bus", "car", indications nécessaires à la construction de l'identité de chacun des personnages rencontrés qui débordent parfois de leur genre. Très peu de musique, si ce n'est pour faire ressortir les tournants de vie que prennent nos deux personnages. On y trouve par exemple un fond tantôt angoissant, lorsque Ke Fan recherche son amie, tantôt romancé pour souligner l'amour qu'il porte à Xing Ting.

C'est ainsi que nous sommes présentés à Xing Ting, recluse dans son temple, prête à faire un grand pas: demain, elle ira dans la ville pour goûter au monde externe...

Une fiction pleine de rebondissements, d'images choquantes, de personnes blessées, ensanglantées, d'accidents, de coups, d'insultes, à laquelle il serait difficile de croire si les images n'étaient pas réelles. Or c'est le cas. Chacune des images est si reconnaissable que l'on ne peut nier que les faits sont arrivés. Ces images sont la preuve de la réalité que vivent les citoyens, et en même temps qu'elles sont la preuve de ce qu'ils ont vécu, elles sont aussi la preuve de la manière dont ils ont vécu: épiés par le gouvernement, par les magasins, par les sites publics, ne leur laissant aucune intimité. Ils sont d'autant plus épiés que ces images de caméras sont accessibles à n'importe quel chinois. Une fiction, qui, de par son contenu et la provenance de ses images, dénonce désastres sociaux, culturels, et naturels. C'est à se demander jusqu'où nous avons besoin de surveiller et jusqu'où nous serons toujours capables de supporter la souffrance d'une population majoritairement piégée par les affres des fonctionnements sociétaux de notre époque.

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